Poésies inédites (1881)

Silence

Pourquoi ne plus chanter, dit la voix de mon cœur.
Ne plus rendre à l’amour l’hommage qu’il réclame.
Et, sans cesse jetant la cendre sur la flamme,
Eteindre tout espoir sous le doute moqueur ?

Je n’ai pas plus nié son triomphe au vainqueur
Que je n’ai fui devant sa redoutable lame ;
Mais, lorsque pour jamais il m’a ravagé l’âme,
Pourquoi mêler ma plainte à son glorieux chœur ?

Ceux qui savent aimer devinent le mystère
Qui de la même main leur verse joie et deuil,
Et fait de leur douleur le seul vrai ciel sur terre.

Oui, je l’ai cru longtemps et j’en connais l’orgueil ;
Mais ceux qui souffrent trop apprennent à se taire
Et recherchent l’oubli comme un premier cercueil.

Pau, 187…

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