Malvina Blancecotte (1830-1897) – réception critique
Madame Alphonse Daudet
Theophile Gautier
Jules Levallois
Pierre Marchand
Charles Augustin Sainte-Beuve
Fabrice W.
Madame Alphonse Daudet
Mme A. M. Blanchecotte procède de Lamartine et de Mme Desbordes-Valmore, tout en restant originale, elle a comme ces deux poètes, une tendance à écouter tout ce qui chante en elle, à le traduire avec abondance et facilité. C’est la même imagination constante, le même élan continu vers la sympathie du lecteur . . . Mme Blanchecotte, est encore, parmi nos modernes, un de ceux qui ont le plus gardé des traditions de poésie subjective, mais les « Militantes » marquent un grand progrès et, de cette personnalité méloncolique trop attachée, selon nous à la lettre de la souffrance, l’auteur commence à se dégager vers les régions supérieures où l’âme de chacun fond et se disperse dans la vie de tous .
Anthologie des poètes français du XIXe siècle (1887)
Theophile Gautier
Élève de Lamartine, elle a gardé du maître la forme et le mouvement lyriques, mais avec un accent profond et personnel qui fait penser à Mme Valmore. Comme celle-ci, Mme Blanchecotte a souvent des éclats et des véhémences de passion d’une sincérité poignante. Elle a de vraies larmes dans la voix. Elle peut dire avec vérité : Ma pauvre lyre, c’est mon âme.
Rapport sur le progrès des lettres par MM, Silvestre de Sacy, P. Féval, Th. Gautier et Ed. Thierry (1868)
Jules Levallois
En ce sens les deux volumes d’Impressions de Mme Blanchecotte nous paraissent appelés à exercer sur les esprits élévés et impartiaux de notre temps une influence salutaire. La maladie du XIXe siècle finissant est une sorte d’atonie morale, une vague détente nerveuse, un aveugle appétit du néant… Les œuvres morales de Mme Blanchecotte sont une tentative, ingénieuse et digne tout à la fois, pour réconcilier l’homme avec la vie, non pas en lui fardant le vrai, en lui dissimulant les difficultés, mais en l’invitant à regarder les obstacles en face, et en lui fournissant autant que possible, à force d’expérience, de courage et d’élévation les moyens d’en triompher. Telle est la vraie signification, telle la haute portée de ces livres et plus spécialement peut-être de ces
Nouvelles Impressions d’une femme. La vie littéraire (1876)
Pierre Marchand
La note mélancolique prédomine en effet dans ce recueil. Madame Blanchecotte chante les doux espoirs évanouis, les aurores pâlies, les illusions mortes, l’amour trompé ou méconnu, le bonheur flétri et perdu pour toujours… Nous ne sommes point en présence de douleurs feintes et théâtrales qui posent devant nous; nous écoutons la voix plaintive et mélodieuse d’une âme éprouvée qui se soulage et nous soulage en disant simplement ses regrets, ses déceptions, qui sont les nôtres. L’inspiration du recueil tout entier est d’une pureté sans reproche.
Le temps (1872)
Charles Augustin Sainte-Beuve
La poésie n’est pas morte; elle ne sommeille même pas. Je crois remarquer que depuis quelque temps il y a un retour plus vif des tentatives, confuses encore, mais qui témoignent d’un désir et d’une espérance de nouvelle veine… Les poètes sont à l’œuvre, et le labeur ni l’inspiration ne cessent pas. C’est ainsi qu’en ouvrant le volume que j’annonce aujourd’hui, j’ai reconnu, dès les premiers vers, un poëte et une âme, une âme douloureusement harmonieuse. On sent que ce n’est point une fiction ni une gentillesse que ce titre d’ouvrière qui se joint aux initiales de l’auteur. Une condition pénible, accablante, tient bien réellement à la gêne une intelligence qui souffre, un talent qui veut prendre l’essor… Il y a un poëte dans ce volume, un poëte à demi enchaîné; aidez-le à prendre l’essor.
Causeries du lundi (1855)
Fabrice W.
Mme Blanchecotte cite souvent Musset. Elle l’aime, on le voit. Et cependant elle prêche ce que le pauvre Musset n’a jamais eu dans l’âme, la fierté de la résistance au malheur, le défi jeté incessamment au désespoir, l’orgueilleuse volupté de la souffrance acceptée avec résignation, et elle écrit à la fin de son livre pour qu’on sache bien où est sa consolation: « Bêche le champ, ô travailleur/ Bêche le champ de la pensée. »
La vie littéraire (1876)