Paul de Molènes
Auguste Desplaces
Eugène de Mirecourt
Théodore de Banville
Roman d’Amat


Paul de Molènes

Le second recueil de vers de Mme Colet indique, rien qu’à la prêtentieuse mélancolie de son titre, Penserosa, qu’on va y trouver la manière des Fleurs du Midi; aussi l’y retrouve-t-on en effet. Toutes les fois que Mme Colet reproche au ciel de lui avoir donné un génie qui la dévore, parle des douleurs de l’âme et des terreurs de l’esprit, enfin paraphrase ces plaintes intarissables de la poésie moderne dont on commence à se lasser, il n’y a point, pour ceux qui la lisent, d’impression pénible. Sur ces sentimens de mode et d’apparat, qu’on bâtisse des vers faux et conventionnels, il n’y a rien là qui puisse froisser ; mais, quand c’est sur les sentimens simples et éternels de tous les honnêtes gens qu’elle construit l’échafaudage de ses grands mots, quand à la place de ces tristesses pompeuses dont d’éprennent souvent les cœurs secs et les têtes vides, elle entreprend de chanter un de ces profonds et réels chagrins que chacun ici-bas est obligé de ressentir aux heures terribles de la vie, quand aux pensées ambitieuses et recherchées de sa poésie artificielle elle allie les souvenirs sacrés d’un lit de mort, en un mot quand elle adresse des vers a un père dont elle nous dépeint l’agonie, à une mère dont elle nous montre les yeux éteints elles lèvres glacées, il y a là une véritable profanation dont on se sent tout irrité et tout ému.

«Simple essais d’histoire littéraire», Revue des Deux Mondes, 1842


Auguste Desplaces

Ses poésies sont peu originales, mais faciles et élégantes. Jeune fille, jeune femme, jeune mère, telles sont les trois phrases de la vie correspondant aux trois recueils qui composent le volume de Mme Colet, et chacune d’elles a donné sa fleur ou son fruit.

Les Poètes vivants, 1847


Eugène de Mirecourt

Un quatrième triomphe académique lui échut en 1854, pour L’Acropole d’Athènes, dédiée à Alfred de Vigny ; Mme Colet a consacré à cette œuvre plus de soin encore qu’aux précédentes. La poésie en est grande et simple tout à la fois ; elle caractérise merveilleusement, selon nous, le génie de l’auteur, qui appartient au romantisme par le fond et au génie classique par la forme. L’Acropole d’Athènes respire un véritable parfum d’antiquité. Si l’on peut s’exprimer de la sorte, ce poème chatoie d’images délicates et de peintures gracieuses. Presque tous les vers semblent tombés de la plume d’André Chénier.

Biographie de Louise Colet, 1856


Théodore de Banville

Mme Louise Colet, poète d’un grand et vrai talent, a balbutié ses premiers essais dans un temps de névrose romantique où il fallait être pâle, fatal, poitrinaire et lis penché, sous peine de mort. Aussi fut-elle tout cela, comme l’exigeaient impérieusement la mode et les convenances ; mais quels démentis cruels donnaient à ce parti pris nécessaire son beau front droit, ses grands yeux plus éveillés que les cloches de matines, son petit nez retroussé comme ceux qui changent les lois d’un empire, et l’arc de sa jolie bouche, et son menton rose, et les énormes boucles de cheveux clairs, lumineux, couleur d’or, tombant à profusion sur un buste dont les blanches, éclatantes et superbes richesses chantaient glorieusement à tue-tête la gloire de Rubens, ivre de rose ! Un des héros de Siraudin s’écrire en une bonne phrase macaronique : Ma fille est droite comme un I, sauf quelques inégalités…que tu ne blâmeras pas. Et certes, il faudrait avoir l’esprit bien mal fait pour ne pas s’associer à la pensée qu’il exprime si judicieusement et avec une si naïve confiance ; mais de quelle solide foi qui avait représenté Mme Colet, splendide alors épanouie comme les Néréides du maître d’Anvers sous la figure d’une jeune femme rêveuse et mourante, étendue près d’une fontaine, et intitulée : Penserosa !

Camées parisiens, 1866


Roman d’Amat

Louise Colet a été sacrée Muse romantique sur la foi de 4 recueils de poèmes ; Fleurs du Midi, 1836 ; Les chants vaincus, 1846 ; Ce qui est dans le cœur des femmes, 1852 ; Ce qu’on rêve en aimant, 1854, Plusieurs de ses contemporains, dont Victor Hugo, qui ne lisait que ses propres œuvres, l’ont couverte de fleurs. Les critiques modernes, qui ont coupé les pages de ses petits livres, ont été moins enthousiastes. Par ailleurs Mme Colet a publié une foule d’écrits alimentaires et de romans que l’on peut négliger. Beaucoup plus intéressants, surtout pour la connaissance du cœur féminin, sont les ouvrages de genre incertain, autobiographie romancées, récits de voyages entre-coupés de souvenirs, pseudo-romans à clé, où elle donne libre cours à son encombrante vanité et à la pérennité de ses rancunes.

Dictionnaire de Biographie française, 1956

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