Poésies inédites (1881)

Réveil

Quand nous étions tous deux perdus dans la feuillée,
Ma jeunesse, soudain par la tienne éveillée,
Tout au fond de mon cœur se remit à chanter,
Comme un oiseau longtemps muet dont la voix gaie,
Après un triste hiver, en hésitant s’essaie,
Tandis qu’il sent au vent ses ailes s’agiter.

Le ciel limpide et calme au-dessus de nos têtes
Semblait ouvrir pour nous ses profondeurs secrètes
Et nous verser l’oubli, l’espérance et l’amour.
Tu m’avais pris la main, et les regards de flamme
Qui brillaient en nos yeux comme un reflet de l’âme
Ajoutaient leurs rayons à cette fin du jour.

Un souffle cependant passa dans la ramure ;
Les arbres inclinés eurent un long murmure ;
De subtiles senteurs parcoururent les airs.
Le rire s’arrêta dans ma gorge oppressée ;
Nous avions à la fois eu la même pensée,
Et nous adorions Dieu sur ces sommets déserts.

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