Louisa Siefert : Promenade
Poésies inédites (1881)
PROMENADE
Si haut qu’on peut aller aux flancs de la montagne,
L’autre jour nous avons monté,
Cherchant la solitude au sein de la campagne,
Dans toute sa sérénité.
Nous avions laissé loin les derniers toits de chaume,
À l’ombre des noyers tapis,
Et les champs pleins de menthe au pénétrant arome,
Et les pacages, verts tapis,
Où les bœufs enfouis entre les hautes herbes
Dormaient vaguement ébauchés ;
Et nous avions atteint les châtaigniers superbes
Qui sont au pied des grands rochers.
Pas un nuage au ciel, pas une ombre-sur terre,
Le lac brillait incandescent.
Le vallon embrasé fumait comme un cratère (1),
La mousse était couleur de sang ;
Et de l’azur, criblé de flèches de lumière,
Tombaient des nappes de clartés,
Qui ruisselaient ainsi qu’une blanche poussière
Au dos des monts diamantés.
O splendeur de beauté qui rayonne et qui pâme,
Spectacle au monde sans pareil !
Ce jour-là dans l’éther et la nature en flamme
C’était la fête du soleil !
(1) Vers reproduits dans Thermidor (Année républicaine).