Louisa Siefert : Prairial
L’année républicaine (1869)
PRAIRIAL
La senteur des foins mûrs enivrait les vallées ;
Mille insectes bruyants aux ailes affolées
Sur les fleurs voletaient ;
Et, dans la joie intense où tous étaient poètes,
Scandant leur hymne saint de rumeurs inquiètes,
À la fois ils chantaient.
Tout était plénitude & tout exubérance :
Les plus audacieux défis à la souffrance
Vibraient aux monts déserts.
L’herbe avait des fiertés, l’arbre des énergies :
C’était dans les couleurs d’éclatantes orgies,
Des hourras dans airs.
Et l’homme sous ses pieds sentant frémir la terre,
Déchiffrant d’un coup d’oeil le souverain mystère
De sa sérénité,
S’écriait à son tour avec un geste auguste :
— L’harmonie est la loi, le plus grand est le juste,
Liberté, liberté !